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Francis Picabia
Description
- Francis Picabia
- VÉNUS ET ADONIS
- signé Francis Picabia (en bas à gauche)
tempera et gouache sur carton
- 104 x 67 cm ; 41 x 26 3/8 in.
Provenance
Dr Paolo Marinotti, Milan
Toninelli Arte Moderna, Milan (acquis du précédent en 1962)
Galleria Schwarz, Milan (acquis du précédent en 1963)
Aℱcquis du précédent dans les années 1980 par le propriétaire actuel
Exhibited
Städtische Kunsthalle Recklinghausen, Signale-Manifeste-Proteste, 1965, no. 70, reproduit
Leverkusen, Museum Schloss Morsbroich ; Eindhoven Stedelijk Van Abbemuseum, Picabia, 1967, no. 47
New York, The Solomon R. Guggenheim Museum ; Toronto, Art Gallery of Ontario ; Cincinnati Art Museum ; The Detroit Institute of Arts, Francis Picabia, 1970-71, no. 87, reproduit p. 129
Milan, Galleria Schwarz, Francis Picabia, 1972, no. 27, reproduit p. 36
Milan, Galleria Schwarz, Francis Picabia, 1974, reproduit
Munich, Städtische Galerie im Lenbachhaus ; Tübingen, Kunsthalle, New York Dada : Duchamp, Man Ray, Picabia, 1973-74, no. 145, reproduit pl. XIV
Parme, Galleria d'Arte Niccoli, Francis Picabia, 1981, reproduit
Milan, Studio Marconi, Picabia, Opere 1898-1951, 1986, no. 24, reproduit p. 83
Vérone, Galleria d'Arte Moderna e Contemporanea, Pallazo Forti, Dadaismo Dadaismi, 1997, no. 75, reproduit
Literature
Lawrence Alloway, "Later works from the long happy life of Francis Picabia", in Auction (New York), IV, no. 4, décembre 1970, p. 51
Yve-Alain Bois, Picabia, Paris, 1975, reproduit p. 71
Maurizio Fagiolo Dell'Arco, Francis Picabia, Milan, 1976, no. 125, reproduit p. 22
William A. Camfield, Francis Picabia, his art, life and times, Princeton, 1979, no. 278, reproduit
Maria Lluïsa Borras, Picabia, Paris, 1985, no. 624, reproduit p. 326
Giorgio Cortenova, Dadaismo e dadaismi, Vérone, 1997, no. 75, reproduit p. 90
Condition
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Catalogue Note
signed 'Francis Picabia' (lower left), tempera and gouache on board. Executed circa 1925-27.
Fig. 1 Titien, Vénus et Adonis, après 1554, huile sur to𓆉ile, National Galle🐎ry, Londres
Fig. 2 Francis Picabia, Femme sur la plage, 1924-27, huile et Ripolin sur toile - Vendu : Sotheby's, Londres, 5 février 2008, lot 55, 1 196 500 £&nb🐈sp;(2 379 🤪673 US$)
Fig. 3 Francis Picabia, Sans titre, 1925-26, huile sur toilꦑe, Collection parti♊culière
Fig. 4 Titien, Danaé recevant la pluie d'or, 1553-54, huile sur ♒toile, Musée du Prado, Madrid
Fig. 5 Francis Picabia, Idylle, 1925, gouache sur carton, Collection Particulière
Fig. 6 Véronèse, Vénus et Adonis, vers 1580, huile sur toile, Musée du Prado, Madrid
"La Carrière artistique de Picabia est une série kaléidoscopique d'expériences. Elles sont à peine apparentées l'une à l'autre dans leur aspect extérieur, mais toutes sont fortement marquées par une forte personnalité" (Marcel Duchamp, cité in. Francis Picabia, classique et merveilleux (catalogue d'♍exposition), pré🌜face, Galerie Beaubourg, Vence, 1998).
Au cours des années 1924 à 1927, Picabia peint un cycle d'œuvres connu sous le nom de série des "Monstres". Ces compositions renouent alors avec des thèmes empruntés à la peinture des maîtres anciens que l'artiste étudie et explore avec passion. Au delà d'une analyse rigoureuse et systématique, l'artiste fait sien les chefs-d'œuvres de la peinture universelle qu'il réinterprète dans une veine moderne. Vénus & Adonis trouve ainsi sa source dans le chef-d'œuvre éponyme de Titien. Fasꦜciné sans doute par le rythme et la dynamique des amants du Maître vénitien qui s'émancipe subtilement du respect strict de l'anatomie humaine, Picabia lui emprunte et amplifie ses déformations ainsi que la complexité de ses poses.
Picabia immortalise ici l'une des rencontres amoureuses parmi les plus célébrées de la mythologie antique, racontée par Orphée à la fin du livre X des Métamorphoses d'Ovide. A l'instar de l'œuvre de Titien, Picabia représente un moment significatif de l'histoire tragique des deux amants : on y voit Vénus tentant de retenir le bouillant chasseur qui la repousse avec douceu𓄧r, prêt à partir vers sa funeste destinée. A gauche de la composition, une forme anthropomorphique, réminiscence du Cupidon du Maître vénitien, semble veiller sur les deux amants.
Aux deux êtres étroitement enlacés, Picabia privilégie toutefois la dynamique des signes graphiques qui les entourent : les éléments picturaux sont ici associés à de nouveaux symboles, réminiscences des signes des années dadas. Dans un esprit transgressif, l'artiste propose ici une peinture du signe pour mieux dépasser le chef-d'œuvre de son aîné. On retrouve ainsi dans Vénus & Adonis le "code graphique" que suit Picabia dans bon nombre de ses "Monstres" : "travestissement systématique des visages en masques grotesques, pourvus de nez pointus et d'immenses yeux en amandes, simplification exagérée des lignes anatomiques, présence obsédante d'un vocabulaire décoratif utilisé à contre-emploi, lignes brisées, hachures, points, spirales qui harcèlent le regard par la multiplicité d'accents portés de toute part à la surface de l'œuvre" (Arnauld Pierre, cité in. Francis Picabia, Singulier idéal (catalogue d'exposition), Musée d'Art Moderne 💎de la ville de Paris, 20🥃02-03, p. 279).
En véritable précurseur de Picasso qui explore quelques décennies plus tard l'œuvre de ses prédécesseurs, Picabia questionne, manipule, digère la composition initiale qu'il métamorphose au gré de ses préoccupations plastiques et esthétiques. Selon Maria Lluïsa Borras, l'influence que ces deux artistes ont exercé l'un sur l'autre et la parenté de leur œuvre est à envisager ici dans le sens d'une antériorité de Picabia sur Picasso : "Le critique des Cahiers d'Arts, revue très proche de Picasso, qui décèle chez Picabia l'influence de ce dernier, ne pouvait deviner que notre peintre était en fait en avance de plus de quinze ans sur l'auteur des Demoiselles d'Avignon, qui allait s'inspirer plus tard d'œuvres de Cranach, d'Altdorfer, de Poussin ou de Courbet. Sur le Picasso des années 50 qui, à l'admiration unanime des spécialistes, allait transformer des œuvres du Greco, de Delacroix, de Velázquez et de Manet selon un procédé qui n'était pas fondamentalement différent de celui qu'employait le Picabia des années 20" (Maria Lluisa Borras, Picabia, Paris, 1985, p. 292-93).
Loin des couleurs vives et éclatantes qui caractérisent certains "Monstres", Vénus & Adonis se distingue par une palette réduite à des couleurs claires, diaphanes : derrière un entrelacs de lignes et de volumes, les dégradés de beiges se mêlent subtilement aux éléments graphiques pour dessiner deux silhouettes au profil gracieux. Tant sur le plan de la démarche que d'un point de vue formel, ces deux amants étroitement enlacés, directement issus de la peinture de Titien, laissent présager les lignes sinueuses et élégantes des Transparences qui voient le jour dès 1927.
"Picabia's artistic career is a kaleidoscopic series of experiments. From the outside they barely seem to be related, but all are strongly marked by a strong personality" (Marcel Duchamp, quoted in. Francis Picabia, classique et merveilleux (exhibition catওalogue), preface, Galerie Beaubourg, Vence,🌄 1998).
From 1924 to 1927, Picabia painted a cycle of works known as the "Monsters" series. These compositions take up themes borrowed from paintings by old masters that the artist passionately studied and explored. Going beyond rigorous, systematic analysis, the artist makes these masterpieces his own and reinterprets them in a modern vein. It is thus that Vénus & Adonis finds its source in the eponymous masterpiece by Titian. No doubt fascinated by the rhythm and dynamism of the lovers in th♈e Venetian master's painting which subtly frees itself from strict respect for human anatomy, Picabia borrows and amplifies his deformations as well as the complexity of his poses.
Picabia here immortalises one of the most celebrated romantic trysts in ancient mythology, recounted by Orpheus at the end of Book 10 of Ovid's Metamorphoses. Inspired by Titian's work, Picabia depicts a significant moment in the tragic love story: we see Venus 🍌trying to hold onto the impetuous hunter who gently pushes her away, eager to depart to meet his doo✅med fate. To the left of the composition, an anthropomorphic form, reminiscent of the Venetian Master's Cupid, seems to watch over the two lovers.
Picabia emphasises the dynamic visual signs surrounding the two tightly intertwined figures: the pictorial elements are here combined with new symbols, reminiscent of the signs of the Dada era. Audaciously, the artist here deploys sign painting in order to surpass his predecessor's masterpiece. We thus find in Vénus & Adonis the "graphic code" that Picabia used in many of his "Monsters": "systematic distortion of faces into grotesque masks, with pointed noses and immense almond-shaped eyes, exaggerated simplification of anatomical lines, the persistent presence of a decorative vocabulary used against type, broken lines, hatching, dots, spirals which assault the gaze with a multitude of focal points on every part of the work's surface" (Arnauld Pierre, quoted in. Francis Picabia, Singulier idéal (exhibition catalogue), Musée d'Art Moderne de la ville de Paris, 2002-03, p♌. 279).
A precursor to Picasso who, several decades later, would also explore the work of his predecessors, Picabia questions, manipulates and breaks up the original composition, transforming it according to his own visual and aesthetic ideals. Maria Lluïsa Borras believes that the influence these two artists held over each other and the relationship between their work should be envisaged in terms of Picabia being anterior to Picasso: "The critic writing for Cahiers d'Arts, a review very close to Picasso, who revealed the influence of the latter on Picabia, could not see that our painter was in fact fifteen years ahead of the creator of the Demoiselles d'Avignon, who would later take inspiration from works by Cranach, Altdorfer, Poussin and Courbet. He was ahead of the Picasso who would, in the 1950s, transform to unanimous praise works by El Greco, Delacroix, Velàzquez and Manet using a process that was not fundamentally different from the one employed by Picabia in the 1920s" (Maria Lluisa Borras, Picabia, Paris, 1985, p. 292-93).
In contrast to the lively bright colours that characterise certain of the "Monsters", Vénus & Adonis has a notably reduced palette of light, diaphanous colours: behind a lattice of lines and shapes, shades of beige subtly merge into the graphical elements in order to delineate the profiles of two graceful silhouettes. In their execution as well as from a formal perspective, these two tightly entwined lovers, directly taken from the painting by Titian, foreshadow the sinuous, elegant lines of the Transparency paintings that would begin to emerge from 1927.