In-4 (292 x 198 mm). Bradel de soie brochée à décor floral sur fond de bandes verticales bleues, roses et crème, doublure et gardes de papier percaliné orné de fleurs et de boutons d’églantines, tête dorée, non rogné, couverture, étui de même soir brochée (Paul Vié).Soie légèrement usée aux bords. Dans une délicate reliure en soie de Paul Vié réalisée pour Mme Arman de Caillavet. Édition originale, réunissant les nouvelles publiées depuis 1892 dans Le Banquet, La Revue blanche, Le Gaulois et L’Année des poètes. Illustrée par Madeleine Lemaire de nombreux dessins, dont 14 hors texte, avec également 13 pages de partitions musicales de Reynaldo Hahn pour Les Portraits de peintres. Préface d’Anatole France. L’un des 1 500 exemplaires sur papier d’édition, non numérotés. Précieux exemplaire de Mme Arman de Caillavet, offert le jour même de sa sortie en librairie.L'envoi de Proust, qui recouvre toute une page de garde, reprend une citation d’Anatole France et se termine par une autre de Voltaire : "Vendredi 12 Juin 96, À Madame Arman de Caillavet "Une de ces femmes, qui nourries dans la douceur du luxe et des arts... donnèrent à la vie, par le sel de leur intelligence... un goût fin qu'on n'y sentait pas avant elles... Elle avait l'âme d'un philosophe... sans rien perdre de sa fierté ni de sa grâce. Nulle n'est plus douce à rencontrer. Il n'en est pas d'un plus gracieux entretien... Elle a des cheveux blonds tout bouffants, un menton gras, un cou frileux..."(Anatole France : La Vie Littéraire) en l'assurant de ma respectueuse et reconnaissante amitié, et en commentant sans cesse avec elle, élue par l'auteur du Lys Rouge, le vers célèbre : "L'amitié d'un grand homme est un bienfait des Dieux".Marcel Proust." Comme souvent, Proust cite de mémoire, ici un long passage de l’article qu’Anatole France avait consacré au Madame de Custine de Bardoux dans la Vie littéraire du 11 mars 1888. Dans l'article de France, les phrases que Proust épingle s’appliquaient dans à Mme de Custine, mais flattent tout aussi bien Mme de Caillavet. Empruntée à Voltaire, la citation qui clôt cet envoi ("L'amitié d'un grand homme est un bienfait des Dieux", Œdipe, I, 1) fait référence au service que lui rendit Mme de Caillavet : c’est grâce à elle qu’il obtint, lui encore inconnu, une préface des Plaisirs et les Jours d'Anatole France. Mme Arman de Caillavet, née Léontine Lippmann (1844-1910), tenait l’un des salons les plus en vue de l’époque. Égérie d’Anatole France, elle entretint une relation enflammée et orageuse avec l’écrivain, de 1887 jusqu'à sa mort en 1910 ; elle lui inspira Thaïs en 1890 et Le Lys rouge en 1894. Marcel Proust lui fut présenté par l’intermédiaire de son fils, Gaston de Caillavet. Dans son salon, il rencontrera Anatole France, comme le narrateur de la Recherche rencontre Bergotte chez Mme Swann. Mme de Caillavet servit de modèle à Mme Verdurin, à qui Proust donna ses manières autoritaires. Charmant exemplaire, dans une délicate reliure féminine de l’époque. Paul Vié, actif dans le dernier quart du XIXe siècle, exerça son art jusqu’en 1907. La reliure dont Mme de Caillavet fit revêtir son exemplaire témoigne de l'estime qu'elle éprouvait pour son jeune protégé.

Mme Arman de Caillavet (1932, lot 249). -- Jean Lanssade (II, 4 mai 1994, lot 133).

Marcel Proust, Bibliothèque nationale, 1965, n° 212a.

Bulletin d'informations proustiennes, 1994, n° 152, p. 188-189. -- Cité dans le catalogue de la Bibliothèque nationale (voir supra). -- N'est pas repris par Kolb, qui n'en mentionne que la date (II, note 1, p. 77).